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Tâche 1: Détection et prévention de l’usage de drogues et des complications neurocognitives associées

Ce projet se subdivise en trois sous-parties.

I. Dépistage et prévention chez les étudiants (projet ADUC & APT)

Un enjeu majeur dans l’amélioration de la prévention et de la prise en charge des mésusages de drogues et des déficits cognitifs associés réside dans le dépistage précoce et l’intervention personnalisée. Plusieurs études épidémiologiques réalisées à la fois à Amiens, Caen (Projet ADUC) et Rouen ont porté sur la consommation d’alcool et des autres drogues chez des populations étudiantes incluant des binge drinkers (BD). Il existe donc une convergence très forte entre les partenaires de la FHU sur cette thématique. L’objectif général est de rechercher l’impact des polyconsommations d’alcool, tabac, cannabis, ainsi que les médicaments et autres drogues présentant un usage problématique potentiel, comme actuellement dans la phase observatoire d’AddictoVigilance du projet ADUC. L’impact de ces consommations est observé sur les capacités cognitives, les comorbidités psychiatriques (cf. WP1 Tâche 1) et le risque addictif afin de mieux les prévenir.

Dans le cadre de la FHU, une collaboration multicentrique permet de compléter les données recueillies à Caen (projet ADUC) et d’étendre le recrutement aux sites d’Amiens et Rouen avec un triple objectif de mise en place :

  1. Phase 1 : une étude épidémiologique longitudinale des pratiques et comportements de consommation des substances psycho-actives auprès des étudiants UNICAEN qui a pour vocation d’établir un panorama des consommations de substances psychoactives et de suivre leurs évolutions sur 5 ans
  2. Phase 2 : des études expérimentales visant à mieux comprendre les causes et les conséquences psychologiques, sociales et médicales de ces consommations à risque afin de mieux comprendre les effets des consommations d’alcool et/ou de cannabis chez les étudiants de l’université de Caen Normandie ; l’objectif étant de mieux prévenir les risques pour la santé, en vue d’accompagner les étudiants en difficulté avec leur consommation
  3. Phase 3 : la conception des actions de prévention et des prises en charge ciblées en direction des étudiants de l’université de Caen Normandie.

La phase 1 est arrivée à son terme : des enquêtes ont été menées chez les étudiants de 2017 à 2022, 2 articles ont été publiés et 2 sont en cours de publication. Concernant le volet expérimental du projet (phase 2) sur les causes et conséquences psychologiques, sociales et médicales, 2 échelles psychiatriques ont été mises en place : une échelle de prodromes psychotiques et uneéchelles des symptômes négatifs avec des données récoltées sur 4 000 étudiants. L'analyse est en cours et une publication a été acceptée. Le troisième volet du projet ADUC a débuté fin 2022 avec les premières inclusions et un second essai (ALCOPREV) a démarré en 2023. le projet ADUC continuera sur ses 3 volets complémentaires avec une finalisation pour du volet 3 pour  fin 2025. Deux nouveaux projets ont également été lancés :

  1. DRUNKO-Cog associant deux partenaires (UNICAEN et le Centre de Soins, d'Accompagnement et de Prévention en Addictologie (CSAPA) de l'EPSM de Caen avec pour  objectif est de qualifier la prévalence de la drunkorexie chez les patients TUAL et aux Troubles des Conduites Alimentaires (TCA), ainsi que d'étudier les déterminants et conséquences cognitives de ce comportement chez ces patients
  2. Disco-Bet dont l’objectif est de conduire une évaluation des distorsions cognitives des joueurs (jeu d'argent) en population étudiante

Un volet transversal d’économie comportementale est aussi envisagé. Dans la tâche d’achat hypothétique ("Alcohol Purchase Task", projet APT), les facteurs individuels et environnementaux qui influencent le comportement de BD seront étudiés. Ces études d’économie comportementale seront aussi lancées dans un modèle animal de BD afin d’étudier notamment l’influence du sexe, de l’impulsivité et de la disponibilité de l’alcool et ou d’autres alternatives non-alcoolisées. Ils seront étudiés à travers un modèle animal de BD.

Une publication a été soumise concernant un nouvel outil de phénotypage du BD qui sera par la suite validé sur une population d'étudiants aux États-Unis.

II. Détection précoce des déficits cognitifs chez les patients TUAL (Troubles de l'Usage d'Alcool)

Bien que les déficits cognitifs soient devenus depuis quelques années un enjeu majeur de la prise en charge des patients TUAL, peu de services d’addictologie ont les moyens humains et financiers de réaliser une évaluation neuropsychologique complète. Le projet comporte 2 thématiques :

  1. Une première thématique sur l'influence des psychotropes sur les déficits cognitifs post-sevrage des patients TUAL : l’équipe de Caen a développé un test de dépistage rapide des troubles cognitifs liés à l’alcool (BEARNI) qui permet à des non-psychologues de réaliser de manière systématique un premier screening des patients. L’objectif est donc d’utiliser ce test sur les 3 sites (Caen, Amiens, Rouen) pour examiner l’influence des benzodiazépines, traitement de référence de la première semaine de sevrage, sur les déficits cognitifs post-sevrage des patients TUAL.
  2. Une seconde thématique sur une approche translationnelle des interactions foie-cerveau dans le TUAL : l’UMR-S 1077 (NIMH) a montré que la fibrose hépatique est un facteur de risque de développer des atteintes neuropsychologiques et qu’elle est associée à l’atrophie cérébrale sous-corticale. L’objectif est de mieux comprendre l’apparition et le développement des atteintes cérébrales et hépatiques grâce à un modèle murin de consommation chronique d’alcool à très long terme. L’UMR-S 1247 (GRAP) participe à ces projets en apportant son expertise sur la modélisation animale du BD volontaire et de l’état de post-dépendance induit par inhalation de vapeurs d’alcool associé à une dépendance physique. Cette approche translationnelle des interactions foie-cerveau dans le  TUAL montre l’importance d’identifier d’éventuelles comorbidités somatiques chez les patients TUAL afin de leur proposer, de manière individualisée, une prise en charge ciblant non seulement leur trouble de l’usage  mais aussi leurs troubles cognitifs potentiellement liés à l’inflammation hépatique.

Dans le cadre de la thématique sur les interactions foie-cerveau, une première étude a été menée sur le lien entre fonctionnement hépatique, inflammation périphérique et atteintes cérébrales structurales et métaboliques dans le TUAL sur des données caennaises et belges. Un article est en cours de rédaction. Une seconde étude concernant la chronologie de développement des atteintes hépatiques et cérébrales liées à l'exposition chronique à l'alcool chez la souris a également été menée et un article est en cours d'écriture.

Une thèse portant sur "Les changements en Addictologie : cognitions, comportements et environnements" a été soutenue en 2022 à l'UPJV avec la publication d'un article et d'un second en phase de soumission à une revue.

Un nouveau projet à Amiens, concernant la dysbiose du microbiote intestinal dans l’hépatite alcoolique aiguë sévère (projet HepatAlc-IM) a été financé par l'IReSP/INCa (Institut pour la Recherche en Santé Publique / Institut National du Cancer) en 2021. Deux nouvelles thématiques de recherche sont venues compléter les 2 axes de recherche avec :

  1. une étude concernant les atteintes motrices dans le diagnostic précoce des altérations cérébrales dans le TUAL dont un article est en préparation et un doctorant qui a débuté à la rentrée 2023
  2. l'étude d'interaction des effets du vieillissement et de l’alcool avec un projet nouvellement financé (projet ALCOH-OLD), ayant obtenu un label d'excellence de la région Normandie.

III. Détection et prévention des complications de sevrage

L’arrêt brutal des consommations d’alcool peut induire un syndrome de sevrage pouvant entrainer des complications neurologiques telles que les crises convulsives ou le delirium tremens, et même le décès du patient. Dans ce contexte, il est important de disposer d’outils prédictifs des complications de sevrage alcoolique.

L’objectif du projet est de développer et tester à plus grande échelle des outils de détection et de prévention des complications de sevrage afin de rendre systématique leur utilisation en pratique clinique. Il est en effet crucial de mieux appréhender les facteurs prédictifs de la sévérité du sevrage afin de pouvoir proposer aux patients à risque de développer des complications neurologiques une prise en charge personnalisée et adaptée. L’UMR-S 1247 (GRAP) a identifié un marqueur génétique des crises convulsives généralisées du sevrage alcoolique et a travaillé sur la validation d’une échelle de prédiction des complications du sevrage. Même en dehors des complications neurologiques de sevrage et en l’absence de sevrages répétés, la sévérité des symptômes de sevrage semble avoir des conséquences sur le sommeil ainsi que sur la structure et le fonctionnement du cerveau (Projet Alcosleep de NIMH, UMR-S 1077).

Le but est de permettre de combiner ces deux approches en examinant si les patients TUAL du protocole Alcosleep ayant des altérations cognitives, cérébrales et du sommeil, associées à la sévérité de leur sevrage présentent un SNP du gène Grin2B codant la sous-unité du récepteur NMDA au glutamate, contrairement aux patients n’ayant présenté que des symptômes légers de sevrage. Ces travaux permettront :

  1. aux urgences, en médecine ou psychiatrie, d’identifier les patients à risque de développer des complications de sevrage
  2. en addictologie, d’anticiper et de prévenir les potentielles séquelles neurocognitives du sevrage.

L'échelle de prédiction des complications de sevrage, "Prediction of the Alcohol Withdrawal Severity Scale" (PAWSS), a été validée. Un article sur l'association d'un SNP du gène codant grin2B sur les complications de sevrage (crises convulsives généralisées) est en cours de publication. Les équipent souhaitent développer l’usage de l’échelle de prédiction en multicentrique.